par exemple récemment :
Élisabeth Badinter, née Bleustein-Blanchet, le 5 mars 1944 àBoulogne-Billancourt, est une femme de lettres, philosophe, féministe etfemme d'affaires française.
Elle est actionnaire et présidente du conseil de surveillance du groupe Publicis, créé par son père1, ce qui lui donne collectivement avec sa famille la 51e fortune de France en 20132.
Robert Badinter lui, refuse la pénalisation de l'achat de prostitution :
Non, Monsieur
Badinter 1
Cri Informations2
N° 107. Juillet/août/septembre 2002.
p. 2, 3
Publié sur le site des Penelopes. Avril 2002
N° 107. Juillet/août/septembre 2002.
p. 2, 3
Publié sur le site des Penelopes. Avril 2002
DATE DE
RÉDACTION : 27/02/2002
DATE DE
PUBLICATION : 01/04/2002
MISE EN LIGNE : 03/09/2006 (texte
déjà présent sur la version précédente du site)
Non, Monsieur Badinter, la prostitution
- ou plus exactement le système prostitutionnel - n'est pas un"fléau". C'est un système de domination
ancestral sur les êtres qui considère comme légitime que des millions de
personnes sur notre planète soient sacrifiées pour le "plaisir sexuel" et/ou pour les
soi-disant besoins irrépressibles des autres.
Non, le système prostitutionnel ne se
réduit pas à "la traite" et
encore moins à la "traite organisée" qui
se limiterait à "l'Europe de l'Est et les Balkans" ainsi
qu'à "l'Afrique Noire". La traite des êtres
humains n'est que la face immergée du système prostitutionnel. La traite ne
concerne que les personnes qui sont transférées à travers les frontières pour
le plus grand profit des proxénètes, des clients et des Etats. Se concentrer
sur la seule "traite", c'est légitimer
le statut, le traitement de toutes les personnes qui ne seraient pas l'objet de
ladite traite, la charge de la preuve leur incombant par ailleurs.
Non, les personnes prostituées, quels
que soit leur âge, leur sexe, leur choix, leur orientation, leur ambivalence
sexuelle, mineur-es ou majeur-es ne sont pas des "victimes
pitoyables", ni mêmes des"esclaves": elles
sont des victimes. Considérer que seules les mineur-es de 15 à 18 ans
mériteraient ce statut, c'est entériner la normalité de la marchandisation des
sexes, des corps, et donc des êtres humains.
Non, les personnes prostituées n'"exercent" pas la prostitution, pas plus
qu'elles "se livreraient à la prostitution", comme
vous l'écrivez dans la rédaction de vos amendements déposés au Sénat, le
7 février. Et les transformer en "acteurs" -
terme repris de la terminologie libérale européenne - ayant le même statut que "le proxénète et le client", c'est nier
la domination, l'exploitation, les violences, qui les a faites prostituées.
Non, les proxénètes ne "travaillent" pas. "Habiles" ou non, "organisés", "en
réseaux", "maffieux" ou
isolés, ils sont tous des "criminels". Limiter
ces qualificatifs aux "proxénètes" des "mineurs de moins de 15 ans", c'est
reconnaître la normalisation de tous les autres. Et laisser penser que ce ne
seraient pas les mêmes qui, pour alimenter ce qui est devenu un
"marché" devaient d'abord et avant tout puiser dans celui de la
"chair fraîche".
Non, "un client de passage",
un client d'"un instant" n'est pas
moins coupable, moins irresponsable ou plus légitime qu'un client régulier.
Celui qui de facto accepte que des
personnes aient été violées, enfermées, volées de leurs papiers (ce qui leur
interdit tout recours à la loi), achetées, vendues, battues, sans protection de
la violence des clients comme de celles des proxénètes, mais aussi de l'Etat
sont des personnes qui n'ont, pour reprendre vos termes, aucun" respect de la personne humaine".
Et cela, et vous le savez très bien, n'a
rien à voir avec le fait d'être "bien pensant".
Faudrait-il donc 'mal penser' pour avoir raison ? Et entre "Freud et Monseigneur Dupanloup », n'y a
t-il pas de place pour une analyse plus "complexe" qui
pourrait notamment intégrer l'apport de celles et ceux qui, depuis si
longtemps, ont critiqué la prostitution au nom du respect de la dignité
humaine?
La pensée abolitionniste et féministe a
dénoncé l'absurdité de continuer à croire que seule une moitié de l'humanité -
la même qui s'était par ailleurs approprié le monopole de la raison - soit
pourvues de pulsions sexuelles, tout comme l'insupportable de penser que seuls
les hommes - puisque c'est bien d'eux dont il faut parler - puissent
légitimement les assouvir. Quel qu'en soit le prix à payer pour celles et ceux
dont la fonction serait d'être un réceptacle de sperme.
Monsieur Badinter, sous couvert :
- des "risques d'une conséquence désastreuse d'une condamnation pénale d'un client" - y compris si la personne prostituée est mineur-e
- de la prise en compte des "conditions misérables" que vivraient les adolescents
- des droits des homosexuels, qui jusqu'à preuve du contraire n'est pas synonyme du droit à avoir des relations sexuelles marchandes entre personnes de même sexe,
- des "risques d'une conséquence désastreuse d'une condamnation pénale d'un client" - y compris si la personne prostituée est mineur-e
- de la prise en compte des "conditions misérables" que vivraient les adolescents
- des droits des homosexuels, qui jusqu'à preuve du contraire n'est pas synonyme du droit à avoir des relations sexuelles marchandes entre personnes de même sexe,
vous avez procédé une apologie du
système prostitutionnel.
Ne vouloir réprimer que les "proxénètes" de "mineurs prostituées" et/ou que le
proxénétisme "organisé"c'est entériner et le bon
droit de tous les autres "clients" comme
des proxénètes à vivre des revenus de l'exploitation des sexes.
Significativement, pas un mot - ne serait-ce que de compassion - ne concerne
les personnes prostituées de plus de 18 ans .
Vous êtes-vous posé la question de
savoir si, pour les personnes prostitué-es par d'autres, pour d'autres, vos
catégorisations sont, pour elles, signifiantes?
Comment peut-on accepter - au mépris de
la convention abolitionniste de l'ONU du 2 décembre 1949 et notamment de son
préambule - une telle régression, un tel déni de l'humanité des êtres ? Les
femmes et les hommes qui n'acceptent pas le "déferlement" de
la pornographie, la banalisation des viols et de toutes les manifestations des
violences contre les femmes vont-elles/ils accepter ce nouveau droit de
l'homme, adolescents compris : le droit aux prostitué-es ?
Enfin, Monsieur Badinter, je voulais
vous dire que votre vision des êtres humains me bouleverse.
Quel respect avez-vous de l'"adolescence" - limitée aux seuls jeunes
hommes - pour écrire que l'on "ne peut exiger d'eux la
même maîtrise de soi que de l'adulte" ?
Quel respect avez-vous des femmes pour
trouver légitime que des jeunes filles "de leur âge" -
c'est-à-dire, elles aussi, adolescentes - soit prostituées pour eux ?
Quel respect avez-vous de la sexualité
pour écrire que l'adolescent "s'accomplit…auprès d'une
prostituée" ?
Quel respect avez-vous des prostituées
pour ne leur proposer aucune alternative à ce qu'elles et ils vivent, dans la
douleur, la souffrance et la violence ?
Faut-il rappeler, à cet égard, que si
l'un-e ou l'autre personne prostituée ne se sentait pas concernée par cette
vision, elle ne saurait invalider la réalité de l'ensemble du système ? Un
ouvrier heureux, un noir sud-africain promu, une femme libre, un paysan
respecté par un système d'échange équitable n'ont jamais empêché la pertinence
de la critique du capitalisme, de l'apartheid, du patriarcat, du libéralisme.
Au terme de la découverte de votre
projet, je suis encore plus convaincue de défendre le seul projet éthique,
cohérent et juste, celle de l'abolition du système prostitutionnel. Pour ce
faire, un nouveau principe, un nouveau paradigme doit être posé: "Le corps humain est inaliénable". Lui
seul est universel.
27 février 2002
Ce texte - remis à M. Badinter - a été
refusée par Le
Monde. Le texte de M.Badinter n'a par
ailleurs été critiqué par personne.
2 53 rue Victor Schoelcher 33300. Bordeaux
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