3.C'est quelque chose de grand que l'amour et un bien au-dessus de tous les biens. Seul il
rend léger ce qui est pesant et fait qu'on peut supporter avec une âme égale toutes les
vicissitudes de la vie.
Il porte son fardeau sans en sentir le poids et rend doux ce qu'il y a de plus amer.
L'amour de Jésus-Christ est généreux; il fait entreprendre de grandes choses et il excite
toujours à ce qu'il y a de plus parfait.
L'amour aspire à s'élever et ne se laisse arrêter par rien de terrestre.
L'amour veut être libre et dégagé de toute affection du monde, afin que ses regards
pénètrent jusqu'à Dieu sans obstacle, afin qu'il ne soit ni retardé par les biens, ni abattu
par les maux du temps.
Rien n'est plus doux que l'amour; rien n'est plus fort, plus élevé, plus étendu, plus
délicieux; il n'est rien de plus parfait ni de meilleur au ciel et sur la terre, parce que
l'amour est né de Dieu, au-dessus de toutes les créatures.
4.Celui qui aime, court, vole; il est dans la joie, il est libre, et rien ne l'arrête.
Il donne tout pour posséder tout, et il possède tout en toutes choses, parce qu'au-dessus
de toutes choses il se repose dans le seul Être souverain, de qui tout bien procède et
découle.
Il ne regarde pas aux dons, mais il s'élève au-dessus de tous les biens, jusqu'à Celui qui
donne.
L'amour souvent ne connaît point de mesure, mais, comme l'eau qui bouillonne, il
déborde de toutes parts.
Rien ne lui pèse, rien ne lui coûte, il tente plus qu'il ne peut, jamais il ne prétexte
l'impossibilité, parce qu'il se croit tout possible et tout permis.
Et à cause de cela il peut tout, et il accomplit beaucoup de choses qui fatiguent et qui
épuisent vainement celui qui n'aime point.
5.L'amour veille sans cesse; dans le sommeil même il ne dort point.
Aucune fatigue ne le lasse, aucuns liens ne l'appesantissent, aucunes frayeurs ne le
troublent; mais tel qu'une flamme vive et pénétrante, il s'élance vers le ciel et s'ouvre
un sûr passage à travers tous les obstacles.
Si quelqu'un aime, il entend ce que dit cette voix.
L'ardeur même d'une âme embrasée s'élève jusqu'à Dieu comme un grand cri: Mon
Dieu ! mon amour ! vous êtes tout à moi, et je suis tout à vous.
6.Dilatez-moi dans l'amour afin que j'apprenne à goûter au fond de mon coeur combien
il est doux d'aimer, et de se fondre et de se perdre dans l'amour.
Que l'amour me ravisse et m'élève au-dessus de moi-même, par la vivacité de ses
transports.
Que je chante le cantique de l'amour, que je vous suive, ô mon bien-aimé, jusque dans
les hauteurs de votre gloire, que toutes les forces de mon âme s'épuisent à vous louer,
et qu'elle défaille de joie et d'amour.
Que je vous aime plus que moi, que je ne m'aime moi-même que pour vous, et que
j'aime en vous tous ceux qui vous aiment véritablement, ainsi que l'ordonne la loi de
l'amour, que nous découvrons dans votre lumière.
7.L'amour est prompt, sincère, pieux, doux, prudent, fort, patient, fidèle, constant,
magnanime, et il ne se recherche jamais; car dès qu'on commence à se rechercher
soi-même, à l'instant on cesse d'aimer.
L'amour est circonspect, humble et droit, sans mollesse, sans légèreté, il ne s'occupe
point de choses vaines, il est sobre, chaste, ferme, tranquille, et toujours attentif à
veiller sur les sens.
L'amour est obéissant et soumis aux supérieurs; il est vil et méprisable à ses yeux.
Dévoué à Dieu sans réserve, et toujours plein de reconnaissance, il ne cesse point de se
confier en lui, d'espérer en lui, lors même qu'il semble en être délaissé, parce qu'on ne
vit point sans douleur dans l'amour.
8.Qui n'est pas prêt à tout souffrir et à s'abandonner entièrement à la volonté de son
bien-aimé, ne sait pas ce que c'est que d'aimer.
Il faut que celui qui aime embrasse avec joie tout ce qu'il y a de plus dur et de plus
amer, pour son bien-aimé, et qu'aucune traverse ne le détache de lui.
Vous m'avez montré principalement en ceci toute la tendresse de votre amour; je n'étais
pas, et vous m'avez créé; j'errais loin de vous, vous m'avez ramené pour vous servir, et
vous m'avez commandé de vous aimer.
2.Ô source d'amour éternel, que dirai-je de vous ?
Comment pourrai-je vous oublier, vous qui avez daigné vous souvenir de moi lorsque,
déjà épuisé, consumé, je penchais vers la mort ?
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