Les Pussy Riot et Nicolas Bernard-Buss


A méditer, ces conditions de prison dénoncées par les Pussy Riot et dont on parle ici: http://russia.tv/video/show/brand_id/5169/video_id/646915.

http://www.valeursactuelles.com/nicolas-raconte-fleury-m%C3%A9rogis20130807.html

8 Août 2013

Exclusif. Nicolas raconte Fleury-Mérogis

Interview. Du 19 juin au 9 juillet, le militant contre la loi Taubira Nicolas Bernard- Buss, matricule 404 247, purge sa peine à Fleury-Mérogis après deux jours de garde à vue. Extraits du récit de sa descente aux enfers à lire en intégralité dans les kiosques à partir du jeudi 8 Août 2013. Photo © DR
Incarcéré à Fleury-Mérogis
[..] Immédiatement menotté, je suis conduit dans la cour du Palais de justice et poussé dans le fourgon de l’administration pénitentiaire avec d’autres condamnés. Placés dans des box minuscules, nous sommes ballottés comme du bétail. On est en juin, il fait affreusement chaud et nous sommes privés d’eau.
Le fourgon reste bloqué une heure dans la cour avant de prendre l’autoroute pour Fleury-Mérogis. Les autres détenus se moquent de moi : « Petit bourgeois, qu’est-ce que tu fais là ? » Je me fais insulter. Ils croient impossible que je sois condamné pour rébellion : « Tu dois être un gros pervers, on va te défoncer en prison. »
[...] Le prisonnier devient un objet. [...] La fouille en prison est intégrale. On me déshabille, les vêtements sont fouillés, les coutures déchirées. À la première plainte, ce sont des coups, des insultes, des brimades. Il y a 4 marques jaunes au sol, il faut se mettre à quatre pattes dessus, comme un animal, pendant que quelqu’un vérifie qu’on n’a rien à cacher. C’est dégradant, déshumanisant, profondément humiliant. Trois heures plus tôt, je n’aurais jamais pensé voir la prison. Je suis désormais le détenu numéro 404 247 [...].
Survie
[...] L’important est d’économiser ses forces. [...] Pour ma première nuit à Fleury, je suis donc tout seul dans une cellule de 3 mètres carrés, au rez-de-chaussée. Il y a des excréments dans les coins, du vomi séché aux murs, la paillasse est imbibée d’urine. Il me reste soixante-deux jours à endurer, dans une position d’infinie faiblesse, libre de rien, privé de tout [...].
"Sous-homme"
Seul dans ma cellule, sans aucune activité, sans repères, entre des affichettes pornographiques collées sur les murs, j’ai dû lutter pour ne pas me sentir un sous-homme. La première nuit, j’ai réalisé très vite ce qui serait le plus dur : les bruits de la prison. C’est le plus violent. En permanence, des détenus sont en train de crier, de taper, de pleurer — des sanglots épouvantables —, de se cogner la tête contre les barreaux. J’entends des cris de démence, de folie, parfois des ricanements, juste à côté. C’est nerveusement insupportable, il y a de quoi devenir fou [...].
Sans repères
Le système carcéral est là pour casser tout repère. À chaque entrée et sortie de cellule, on subit une fouille intégrale. [...] On perd confiance en soi, même si on a décidé de résister. On commence à se demander si on n’a pas mérité ça.
La perte de repères est aussi temporelle : je n’ai aucun moyen d’avoir l’heure, et pour compter les nuits, je fais des encoches dans une allumette trouvée à côté des barreaux. En comptant les jours qui passent, je pense à mes partiels : « En ce moment même, en lieu et place de la prison, je devrais passer mes oraux. »
Isolement
Mes avocats me préviennent que des députés veulent venir me voir. Je porte toujours les habits du jour de mon arrestation. Très tôt le matin, en catastrophe, des surveillants débarquent pour me changer de cellule. Je quitte le bâtiment D4, le plus insalubre, jamais rénové depuis la construction de Fleury, en 1968, pour une cellule du quartier de très haute sécurité (THS). La cellule est un peu plus grande, il y a une table, une chaise et un semblant de douche. Deux heures plus tard, les députés sont là.
Ennemi public numéro 1
J’ai croisé très peu de prisonniers. En revanche, ma cellule au THS était voisine de celle de Redoine Faïd, l'ex-ennemi public numéro 1 [le braqueur spécialisé dans l’attaque de fourgons blindés, évadé à l’aide d’explosifs, le 13 avril, de la maison d’arrêt de Sequedin, dans le Nord, après une prise d’otages, repris et incarcéré à Fleury-Mérogis, NDLR]. Je ne l’ai jamais vu, la très haute sécurité interdit tout contact, mais j’ai pu discuter avec lui par la fenêtre. Je lui ai dit en riant : « Si tu t’évades, prends-moi avec toi ! »
Soutiens
[...] On m’apporte le courrier des deux premiers jours, daté des 20 et 21 juin. Il y a plus de 700 lettres. Les surveillants me signifient qu’ils n’ont pas pu tout ouvrir, lire et trier, et que le reste arrivera plus tard. Le lendemain, ils reçoivent plus de 1 000 lettres en une journée. [...] Ce fut un réconfort immense.
Retrouvez le dossier de la semaine > Quand la France était heureuse - les années Pompidou

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