Depuis que je m'interroge sur l'avancée de la loi islamique en France, et en occident en général, je recherche une union des Français, croyants ou non, autour de valeurs communes, dans un projet positif et constructif,
et pour cela, il me semble important de réfléchir à ces valeurs de la civilisation française, sans s'enfermer dans des oppositions de bloc entre les différentes pensées.
La guerre contre la religion française en France m'est étrangère, je ne la comprends pas et j'espère qu'elle cessera
Je ne suis pas la seule féministe à le dire puisque Ayaan Hirsi Ali prône également la conversion des musulmans au christianisme.
Alors à moins que le racisme avéré de toute une partie de la gauche pour les arabes et populations musulmanes ne fasse qu'ils osent encore une fois traiter de "malades" haineux de soi ou de "traumatisés" les personnes issues de pays soumis à l'islam et qui le critiquent, je pense que l'exemple de cette femme peut difficilement passer pour non significatif.
Je ne doute pas qu'une partie des carriéristes qui mentent perpétuellement sur l'islam pour demeurer en vue dans leur petit panier de crabe n'oseront une telle agression contre elle.
Lire ci -dessous un compte rendu de sa thèse dans un de ses livres.
Je souligne le passage en rouge dont je partage tout à fait le constat et le projet.
Je vois à nouveau un heureux présage de cette réflexion commune autour de valeurs de base dans le soutien de figures de la gauche et du féminisme à la pétition contre la GPA qui vient de paraitre dans Libération, et que l'on peut lire ici, ainsi il n'y aura pas que " la manif pour tous" et la droite pour s'offusquer de cette atteinte aux droits fondamentaux des enfants et des femmes :
http://reformesfeministes.blogspot.fr/2014/07/liberation-petition-contre-la-gpa-nous.html
S'il faut que les féministes consentent à s'interroger sur les raisons des chrétiens de s'émouvoir de l'avortement, au lieu de les dépeindre comme d'immondes fachos sadiques ne rêvant que de voir des femmes agonir dans d'horribles souffrances, je ne vois pas de grand obstacle à franchir : il suffit d'ouvrir un livre d'obstétrique, au lieu d'écouter les crétineries de certaines érinyes.
"One of us" or not " One of us" ?
S'il faut que les féministes consentent à s'interroger sur les raisons des chrétiens de s'émouvoir de l'avortement, au lieu de les dépeindre comme d'immondes fachos sadiques ne rêvant que de voir des femmes agonir dans d'horribles souffrances, je ne vois pas de grand obstacle à franchir : il suffit d'ouvrir un livre d'obstétrique, au lieu d'écouter les crétineries de certaines érinyes.
"One of us" or not " One of us" ?
Pour ce qui est de ma recherche d'une réflexion commune et de ses raisons, elles sont exposées en résumé dans les articles suivants publiés par Riposte laique :
Les Français doivent résister et s’unir, pour défendre des valeurs de liberté et d’amour
Pour ma part, je pense que ce qui fait l’unité des idées européennes, ce sont les idéaux et valeurs de Liberté et d’Amour :
que l’on soit humaniste ou croyant, de droite ou de gauche, réac ou gay, quel que soit le système politique que l’on prône : ces valeurs de Liberté et d’Amour ( ou vice versa) se retrouvent, autant de différences et de contradiction qu’il y ait entre les visions des uns et des autres, (et d’ailleurs ne sont elles pas contradictoires en soi, tout en étant indissociables et complémentaires …).
Il nous faut inventer un « new deal », un nouveau contrat avec les autres nations, c’est un chantier énorme, et c’est un chantier préalable ou au mieux concomitant au chantier de désislamisation de la France. Nous ne pourrons évacuer les traces de la loi d’Allah d’ici, qu’en ayant choisi définitivement les principes opposés, donc excluant l’esprit revanchard ou punitif, et en ayant un projet économique et écologique crédible à proposer comme plan aux Nations.
La réflexion sur le rôle économique des femmes et des enfants est capitale dans un tel plan, mais sa base n’est plus à inventer : cette base est la femme, l’enfant n’est pas un objet. Par conséquent l’économie doit être organisée en tenant compte à la fois de la différence des corps et de leur différentes aptitudes et besoins, et en interdisant toute utilisation du corps d’autrui pour ses propres caprices, tout atteinte à l’intégrité physique d’autrui.
Le regard à porter sur les courants de pensées qui participent aujourd’hui à l’élan pour la civilisation française, doit être un regard en profondeur : il faut cesser de voir l’autre pensée comme un « bloc » univoque. Le « progrès » ou la régression, et ce qui les favorisent ne sont pas dans un camp, être « contre » le danger urgent urge mais être « pour » un, des projets, est non seulement indispensable, mais peut-être le moyen le plus sûr pour désamorcer l’arme braquée sur soi.
« Occupes toi du bien, le mal s’en ira de lui-même » disait Nachman de Breslev.
Les idées chrétiennes peuvent avoir des dangers d’abus de pouvoir, mais je suis d’accord avec Béatrice Bourges quand elle y voit aussi un progressisme aujourd’hui ; les idées « laiques », athées, apportent beaucoup au progrès par leur ouverture, mais elles sont aussi tellement ouvertes aux expériences oubliant les êtres humains et l’asservissant au marché … Il serait absurde d’en rester à une vision en « blocs » des pensées.
Cristina
Álvares est Professeur Associé au Département d’Études Françaises de
l’Université de Minho, à Braga, Portugal. Ses domaines de recherche sont la
littérature française médiévale et contemporaine, la psychanalyse, et la
sémiotique narrative. Elle est auteure de O amor da letra: o heterogéneo, o
artificial e o feminino no Roman de la Rose, de Jean Renart, Braga,
Universidade do Minho/Hespérides, 1999.
Ayaan Hirsi
Ali, Nomad. From Islam to America. A Personal Journey Through the Clash of
Civilizations
Nomade. Ce mot a ici un double
sens. Le sens archaïque, tribal, d’une forme de vie représentée encore au XXe
siècle par l’histoire de la grand-mère de l’A. et par les valeurs
islamo-claniques qu’elle a transmises à ses petits-enfants en les élevant en
Somalie. Le sens (post)moderne, transnational, des groupes en diaspora ou de
l’individu déraciné, anglophone et/ou plurilingue, qui se déplace entre pays et
continents avec sonapple et son blueberry,
se rêvant citoyen d’une grande ville du monde qui pourtant n’existe pas. Car le
monde n’est pas une grande ville dont les habitants seraient des citoyens égaux
devant la loi. Ce grand idéal moderne devient de plus en plus lointain,
s’effiloche dans le brouillard et la cacophonie des idées obscures, voire
obscurantistes, qui dominent en Occident. Or le troisième livre d’Ayaan Hirsi
Ali est un point lumineux au milieu de la confusion idéologique dans laquelle
nous vivons. Il décrit avec clarté la situation des sociétés occidentales,
vulnérables à la menace islamiste du fait de l’assimilation manquée des
immigrés musulmans. Un échec qui n’est pas à mettre sur le dos uniquement des
immigrés eux-mêmes mais aussi et surtout de la politique multiculturaliste et paternaliste
(the racism of low
expectations). Au lieu d’aider les immigrés à devenir des citoyens,
cette politique les fixe à une ‘identité culturelle’, c’est-à-dire à une forme
de vie tribale et pré-moderne, incompatible avec celle des pays qui les accueillent.
De l’Islam en Amérique. Ce sont
les deux pôles qui balisent le parcours de vie extraordinaire de Ayaan Hirsi
Ali. Ces pôles sont hétérogènes : d’une religion à un pays, car ‘Amérique’
désigne ici les USA. Ils correspondent aussi aux deux sens de nomade : le
sens tribal qui est celui dont l’A. a fait l’expérience enfant et
adolescente ; et le sens moderne de ‘land of the free’, le pays où les
immigrés, réfugiés, exilés des quatre coins du monde trouvent la liberté. Les
deux nomadismes de Hirsi Ali correspondent à deux façons d’appartenir :
par naissance et par choix. L’hétérogénéité qui sépare ‘Islam’ et ‘Amérique’
est celle qui sépare le monde à fondation religieuse et le monde moderne. Le
parcours de vie de l’auteur est un itinéraire géographique qui la déplace, déjà
jeune femme, du Kenya aux Pays Bas, pour échapper à un mariage forcé ;
puis, suite à l’affaire Verdonk et à la perte de la citoyenneté hollandaise en
2006 (chapitre 8), des Pays Bas aux USA. Mais c’est surtout un voyage dans le
temps, depuis la préhistoire jusqu’au XXIe siècle. Avant d’atteindre la
quarantaine, Ayaan Hirsi Ali a traversé différentes formes de vie et différents
niveaux de civilisation. Cette diversité s’organise en deux systèmes de
valeurs et de pratiques, représentés par ‘Islam’ et par ‘Amérique’, dont la
coexistence est impossible. D’un côté, la soumission, l’autorité, le dogme, la
primauté du groupe sur l’individu ; de l’autre, l’autonomie, la liberté de
conscience, la science, la primauté de l’individu (je dirai plutôt du sujet en
tant qu’il ne rentre pas tout dans le groupe et la culture qui lui sont échus
en partage, en tant que le sujet est au-delà des contenus qui déterminent son
identité et appartenance). Et surtout la condition des femmes : citoyennes
en Occident, propriété à échanger en Islam. D’où le clash.
Au lieu de tolérer l’intolérable : mariages forcés, enfants fiancées,
excisions, polygamie, crimes d’honneur, gendercide (avortement de bébés du sexe féminin),
voiles, niqaabs, burkas et autres formes de misogynie
institutionnalisée et de crimes contre les femmes, ce qu’il faut faire,
c’est l’idée-force du livre, c’est moderniser les musulmans qui se
trouvent en Occident, en faire des citoyens, leur procurer les conditions
permettant la transition de la forme de vie archaïque – en langue somali, le Miyé – à la forme de vie urbaine et moderne
– le Magaalo –
avec ses droits et libertés, d’un côté, et ses devoirs et responsabilités, de
l’autre. C’est ce que l’auteur appelle the opening of the Muslim mind.
Le livre a quatre parties. La
première est consacrée à la famille de l’auteur et raconte les histoires de son
père, sa mère, sa demi-soeur, son frère, son neveu, ses cousines. Les récits
tournent autour de leur résistance à couper, même lorsqu’ils habitent à Londres
ou dans une autre société démocratique, leurs amarres culturelles et
religieuses et à renoncer, sinon à l’Islam, au moins à une version mauvaise,
violente, sexiste et intolérante de cette religion, tout comme les occidentaux
en ont fait il y a longtemps par rapport au christianisme. Le cas le plus
illustratif est sans doute celui de Sahra, sa demi-sœur, qui lui rend l’image
de ce qu’elle-même serait devenue si elle avait poursuivi le voyage jusqu’à
Toronto pour épouser l’homme que son père avait choisi : incapable
d’établir des liens sociaux au-delà du clan, Sahra vit dans une prison au beau
milieu d’une société libre. Sahra est un exemple du fait que le relativisme
culturel ne produit pas de coexistence pacifique et conviviale entre cultures
et ethnies mais des enclaves d’oppression, d’ignorance et de pauvreté. Sahra
est également exemplaire d’une attitude collective de résistance à la
modernité, d’immunisation contre la ‘décadence occidentale’. Les musulmans ne
veulent pas être contaminés par ‘des idées dégénérées’. Ce discours n’est pas
nouveau. Les nazis et les communistes le répétaient à satiété.
La seconde partie est consacrée
aux événements qui ont déterminé le départ de l’auteur aux USA, à ses premières
impressions de ce pays et à l’analyse de la montée de l’Islam dans la société
américaine. Hirsi Ali se livre à une comparaison entre les deux versions du
modèle occidental, l’américain et l’européen, notamment le hollandais, en ce
qui concerne le paysage et le climat, les think tanks, la famille,
la fonction de l’état, l’immigration et aussi la perception de l’Islam.
L’auteur s’étonne de ce que les américains associent l’Islam à la politique
internationale mais ne le perçoivent pas comme une question socioculturelle
interne. Pourtant les signes de la montée de l’islamisme aux USA, à travers la
radicalisation des jeunes et des femmes, sont nets : filles scolarisées à
la maison, de plus en plus de filles voilées, excisions, femmes à la mosquée,
jeunes gens qui se considèrent premièrement musulmans et deuxièmement
américains. Ajoutons 5 crimes d’honneur entre 2004 et 2009 perpétrés
en territoire américain. Elle réfère aussi le cas de Nidal Malik Hassan, en
novembre 2009, et son abordage par les medias passant sous silence les
motivations religieuses de l’acte meurtrier du militaire américain. Ce sont là
des symptômes de l’avancée du processus de radicalisation de l’Islam
traditionnel. Mais l’A. souligne qu’il faut se garder de penser l’Islam
traditionnel comme un soi-disant Islam modéré, selon le modèle des chrétiens
modérés. Il n’y a pas d’Islam modéré et c’est bien pourquoi le processus de
radicalisation est si facile. Les nouveaux ‘jihadistes’, les nouveaux militants
islamistes, étaient des musulmans traditionnels. L’idée d’un Islam modéré est
un leurre dénoncé aussi dans l’univers francophone, notamment par Wassyla
Tamzali : les soi-disant modérés, puisant dans l’argumentaire postmoderne
et multiculturaliste, et par là même se donnant des airs de modernité (ils ont
une autre perception de l’égalité des sexes, l’Occident n’a pas le monopole des
concepts et des définitions), font passer dans l’opinion publique un
néo-antiféminisme diffus et implicite qui est une des pièces de l’islamo-tribalisation des mœurs en France[1].
Dans la troisième partie, Ayaan
Hirsi Ali analyse les trois obstacles majeurs à la modernisation des immigrés
musulmans : la morale sexuelle ; l’argent ; la violence. Elle
revient sur la scolarisation à la maison des filles. La raison en est que
fréquenter une école qui enseigne la pensée critique est un défi au pouvoir
masculin et à la culture de soumission des femmes. Confinées de bonne heure à
la maison, elles ne seront pas ‘corrompues’, ce qui veut dire que leur
sexualité est sous contrôle, ainsi que leur tête, et qu’elles pourront être
échangées (données en mariage, répudiées). L’école publique, institution issue
des Lumières, est effectivement l’instrument le plus puissant contre la morale
sexuelle archaïque, en l’occurrence, la morale islamo-tribale, et en faveur de
l’émancipation des femmes. Les études sont indispensables à ce que les jeunes
ne restent pas confinés à la culture de leur famille. Il faut donc assurer la
présence à l’école des filles musulmanes en même temps qu’il faut prendre des
mesures pour stopper la ‘tribalisation’ de l’école.
En ce qui concerne l’argent,
l’A. raconte ses propres difficultés dans la gestion budgétaire quand elle est
arrivée aux Pays Bas. Les immigrés ont besoin d’acquérir de la culture
financière nécessaire à la citoyenneté responsable. Garder la morale archaïque
en matière d’argent ne fait que perpétuer leur pauvreté et leur dépendance.
Encore un effet nocif de la politique multiculturaliste qui, au lieu de
respecter les individus et de promouvoir leur mobilité sociale, se fait un
devoir de ‘respecter les cultures’ et leur status quo. Mais qui ne
voit pas que c’est là l’attitude la plus conservatrice, la plus réactionnaire
qui soit ? C’est la loi du pays d’accueil qu’il faut respecter, car la loi
est au-dessus des familles, des cultures et des religions, pour assurer que
tous les individus, hommes et femmes, indépendamment de la culture à laquelle
ils appartiennent, de la religion qu’ils professent ou pas, ont les mêmes
droits et devoirs. La dérive culturaliste et son fétichisme de la diversité
vient de la perte de la notion d’universalité de la loi et d’égalité des
droits. Ayaan Hirsi Ali critique à plusieurs reprises l’archevêque de
Canterbury qui a soutenu que la Sharia devrait prendre place au Royaume Uni. Il
y aurait ainsi au même pays côte à côte deux lois, un état de droit et une
enclave islamiste, des meurtriers condamnés à la prison et des femmes adultères
lapidées en publique, bref des citoyens et de la racaille. On peut légitimement
s’indigner que quelqu’un ayant la responsabilité de l’archevêque de Canterbury
ait énoncé de tels propos qui heurtent de front la charité et l’universalisme
chrétiens. Mais à bien y réfléchir, ce n’est pas tellement étonnant. Il suffit
de se rappeler que Rowan Williams est druide, ce qui marque, au-delà de son
allégeance folklorique à l’ethnie galloise, son adhésion au paganisme et au
monde archaïque dont le christianisme nous avait pourtant affranchis. Mais pour
lui tout se vaut, tout se tient : paganisme, christianisme, islamisme.
Quand on s’aperçoit à quels compromis immoraux mène le relativisme culturel, on
se réjouit de ce que l’Eglise de Rome sache garder la lucidité nécessaire à ne
pas embarquer dans le délire postmoderne.
Quant à la violence, il s’agit
bien de celle qui est inscrite et justifiée dans et par le Coran :
expansion de la foi par la force, battre ses femmes, liquidation des juifs, des
homosexuels, des adultères, des apostats. Alors que les sociétés occidentales
regardent la violence comme une action barbare, dans la culture islamique la
violence intègre le système de discipline sociale. La différence entre un crime
d’honneur et la violence domestique est que celle-ci est socialement condamnée
et punie par la loi, tandis que celui-là est socialement approuvé et légitimé
par Allah. ‘Islam is not only a belief; it is a way of life, a violent way of
life. Islam is imbued with violence, and it encourages violence’ (p.201). C’est
pourquoi il n’y a pas d’Islam modéré. Certes, les musulmans traditionnels ne
commettent pas d’attentats terroristes comme ceux perpétrés par des groupes
radicaux plus ou moins associés à Al-Qaida. Mais la violence de la communauté
sur l’individu et des hommes sur les femmes, est une réalité quotidienne chez
les musulmans.
Dans la quatrième partie, l’A.
présente des propositions pour remédier à la situation. Son cadre de références
et de valeurs est celui des Lumières et en cela sa voix converge avec des voix
francophones de femmes issues aussi de cultures musulmanes: l’iranienne
Chahdortt Djavann, l’algérienne Wassyla Tamzali, la française d’origine kabyle
Fadela Amara.
Au grand projet de
modernisation des musulmans, Hirsi Ali convoque trois institutions
majeures : l’école (au sens large qui comprend l’université), le mouvement
féministe et l’Eglise Catholique (et aussi les autres églises chrétiennes).
Cette dernière constitue le point le plus surprenant de l’essai d’Ayaan Hirsi
Ali, étant donné que l’Eglise de Rome, au contraire de l’école et du mouvement
féministe, n’est pas historiquement une institution des Lumières, bien au
contraire. Néanmoins, l’A. reconnaît justement que l’Église possède des
qualités modernes qui manquent dramatiquement à l’Islam : liberté de
conscience (contre crime d’apostasie), mixité des genres au lieu de culte
(contre ségrégation des femmes à la mosquée), séparation des affaires
spirituelles et des affaires temporelles (qui est en fait le trait axial de la
modernité). Aussi, étant donné l’intoxication idéologique de l’université et la
crise du mouvement féministe remplacé par des impostures comme le ‘féminisme
islamique’ et le ‘colonial feminism’ (p.131), est-ce aux églises chrétiennes,
et notamment à l’Eglise catholique, que l’A. confie la tâche décisive du
projet : convertir les immigrés musulmans à la modernité en reprenant son
service social et spirituel dans les ghettos. Hirsi Ali propose une alliance
stratégique entre l’Eglise et laïcs pour combattre l’islamisation et gagner la
bataille des idées et des âmes, au moyen ‘of a deliberate drive to urge
immigrants to adopt Western values’ (p.248). Car ‘the random messages of Nike
advertisement and pop culture were not enough to anchor this new, disoriented
immigrant population into a sense of citizenship and community with Europe. The jihadis didn’t have any real competition; of
course they spread’ (p.249). Mais s’engager et gagner cette compétition
religieuse suppose évidemment que l’on cesse de nier la réalité du ‘clash of
values’. Et pour affronter la réalité il faut que chrétiens et athées renoncent
à leur attitude atonique et blasée.
Ce projet de modernisation
comprend encore une opération de la plus haute importance qui serait à
développer par l’université : l’analyse historique et philologique du
Coran. Qui l’a (ré)écrit, quand, comment ? Comment déterminer son
authenticité ? Traiter le Coran comme un texte s’avère une tâche
nécessaire à sa démystification de livre incréé et, par conséquent, à une
attitude de recul critique de la part des musulmans par rapport à leur Livre et
à la distinction des deux plans de la compréhension et de la croyance, de la
vérité et de l’autorité, de l’esprit et de la lettre. Ceci a été fait pour la
Bible, notamment pour le Nouveau Testament, car sa structure, qui est plurielle
(il y a quatre évangiles, donc quatre versions) et narrative (la révélation du
Verbe incarné s’exprime dans des récits), se prête à l’analyse philologique,
historique et herméneutique, l’appelle même. C’est bien plus difficile de
soumettre le Coran à la critique textuelle, parce que sa révélation étant celle
du Verbe (pas incarné), tout ce qui arrive dans le monde et le temps est, selon
l’ontologie archaïque étudiée par Mircea Eliade, reconduit à l’origine
intemporelle sacrée, en l’occurrence ‘à la matrice originelle des sourates
éternelles’[2].
Mais toute difficile que cette
opération puisse paraître, ainsi que le projet dans son ensemble, il faut les
mettre en place. C’est à cette condition que l’on pourra parler non pas
exactement d’un ‘Islam des Lumières’[3] mais
plutôt de l’impact civilisateur des Lumières sur l’Islam.
Ayaan Hirsi Ali, Nomad.
From Islam to America. A Personal Journey Through the Clash of Civilizations,
London/New York/Sydney/Toronto, Simon & Schuster, 2010, 277p.
[1] Wassyla
Tamzali, Une femme en colère. Lettre d’Alger aux
Européens désabusés, Paris, Gallimard, 2009, p.128-9. Le
néo-antiféminisme n’est pas un phénomène spécifiquement français. Pensons par
exemple au petit reportage, transmis cette année par toute chaîne de télé, sur
le 5e mariage du président d’Afrique du Sud, Jacob Zuma. Le ton d’approbation
satisfaite des media occidentaux face à cet exemple de diversité culturelle
‘qui subsiste’ grâce au retour à la tradition précoloniale des Zoulous, était
pour le moins hautement offensif des droits et de la dignité des femmes. Même
les associations féministes qui ont protesté, ont déplacé l’accent de la
question de l’égalité des droits à la question de santé publique : le SIDA
(cf.http://www.rfi.fr/actufr/articles/110/article_78132.asp).
Là aussi, Ayaan Hirsi Ali a le courage d’énoncer clairement ce que beaucoup
n’osent pas dire : l’amélioration de la condition des femmes a été un
effet collatéral de la colonisation. Elle écrit p.132 : ‘One great side
effect of colonization, however, was that European countries brought their
political and legal infrastructure to many Muslim countries [et pas seulement],
which did improve the situation of women in significant ways (…) after the
colonizers left, many countries reintroduced Shari’a law – always, first, as
‘Family law’ (in other words, women’s law) – and the situation of women in
every case became worse’. Ceci est vrai aussi de l’Afghanistan occupé par les
soviétiques.
[2] Sylvain
Gouguenheim, Aristote au Mont Saint-Michel. Les
racines grecques de l’Europe chrétienne, Paris, Seuil, 2008, p.200
[3] ‘L’Islam
des Lumières’ n’existe que dans la belle fiction en BD de Frank Giroud Le
Décalogue [http://www.glenatbd.com/recherche/?q=decalogue].Le
décalogue est la forme d’une sourate méconnue qui aurait été écrite de la main
du Prophète sur une omoplate de chameau. Ses dix commandements, fortement
inspirés de ceux de Moïse, constituent un message de tolérance et de
non-violence qui, en enlevant tout fondement à la guerre sainte, menace le
programme d’expansion de l’Islam par conquêtes de territoires et conversion des
populations. Le dernier volume nous apprend que les dix préceptes politiquement
dangereux avaient finalement été composés non pas par le Prophète mais par un
poète qui avait extrait du Coran ce qui, à ses yeux, il y avait de meilleur
(pourtant la ressemblance de ce décalogue avec le décalogue mosaïque dément
cette origine endogène). Dans l’ignorance de cet élément désacralisant, un
groupe de crypto-musulmans, commandé par une femme, a gardé l’omoplate et
transmis clandestinement son message de génération en génération comme étant
celui du vrai testament du Prophète et du vrai Islam.
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